Page:Huc - Souvenirs d’un voyage dans la Tartarie, le Thibet et la Chine pendant les années 1844-46, tome 2.djvu/305

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notre juge ; il puisa dans sa tabatière une abondante prise de tabac, et le renifla de très-mauvaise humeur. — Oui, c'est vrai, j'ai vu beaucoup d'Européens à Canton. Vous êtes de la religion du Seigneur du ciel, n'est-ce pas ? —Certainement ; nous sommes même prédicateurs de celle religion. — Je le sais, je le sais ; vous êtes, sans doute, venus ici pour prêcher cette religion ? — Nous n'avons pas d'autre but. — Avez-vous déjà parcouru un grand nombre de pays ? — Nous avons parcouru toute la Chine, toute la Tartarie et maintenant, nous voici dans la capitale du Thibet. — Chez qui avez-vous logé quand vous étiez en Chine ? — Nous ne répondons pas à des questions de ce genre. — Et si je vous le commande ? — Nous ne pourrons pas obéir ... Ici, le juge dépité frappa un rude coup de poing sur la table. — Tu sais, lui dîmes-nous, que les chrétiens n'ont pas peur ; pourquoi donc chercher à nous intimider ? — Où avez-vous appris le chinois ? — En Chine. — Dans quel endroit ? — Un peu partout. — Et le tartare, le savez-vous ? où l'avez-vous appris ? — En Mongolie, dans la Terre des herbes.

Après quelques autres questions insignifiantes, Ki-Chan nous dit que nous devions être fatigués, et nous invita à nous asseoir. Changeant ensuite brusquement de ton et de manière, il s'adressa à Samdadchiemba, qui, le poing sur la hanche, s'était tenu debout un peu derrière nous. — Et toi, lui dit-il d'une voix sèche et courroucée, d'où es-tu ? — Je suis du Ki-Tou-Sse. — Qu'est-ce que c'est que ce Ki-Tou-Sse ? qui est-ce qui connaît cela ? —Ki-Tou-Sse est dans le San-Tchouen ? — Ah! tu es du San-Tchouen, dans la province du Kan-Sou ! Enfant de la nation centrale, à genoux ! — Samdadchiemba pâlit, son