Page:Huc - Souvenirs d’un voyage dans la Tartarie, le Thibet et la Chine pendant les années 1844-46, tome 2.djvu/332

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pas empêché d'acquérir une connaissance approfondie des livres lamaïques. Tout le monde s'accordait à dire que la science des Lamas les plus renommés, était inférieure à celle du Régent. On admirait surtout l'aisance avec laquelle il expédiait les affaires. Un jour, nous nous trouvions chez lui, quand on lui apporta un grand nombre de rouleaux de papier ; c'étaient les dépêches des provinces ; une espèce de secrétaire les déroulait les unes après les autres, et les lui présentait à lire, en tenant un genou en terre. Le Régent les parcourait rapidement des yeux, sans pourtant interrompre la conversation qu'il avait engagée avec nous. Au fur et à mesure qu'il avait pris connaissance d'une dépêche, il saisissait son style de bambou, et écrivait ses ordres au bas du rouleau ; il expédia ainsi toutes ses affaires avec promptitude, et comme en se jouant. Nous ne sommes nullement compétents pour nous faire juges du mérite littéraire qu'on attribuait au premier Kalon ; il nous est seulement permis de dire que nous n'avons jamais vu d'écriture thibétaine aussi belle que la sienne.

Le Régent aimait beaucoup à s'occuper de questions religieuses, et le plus souvent elles faisaient la principale matière de nos entretiens. Au commencement, il nous dit ces paroles remarquables : — Tous vos longs voyages, vous les avez entrepris uniquement dans un but religieux ; vous avez raison, car la religion est l'affaire importante des hommes ; je vois que les Français et les Thibétains pensent de même à ce sujet. Nous ne ressemblons nullement aux Chinois qui comptent pour rien les affaires de l'âme. Cependant, votre religion n'est pas la même que la nôtre ;... il importe de savoir quelle est la véritable. Nous les examinerons