Page:Hugo Œuvres complètes tome 5.djvu/210

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Et les peuples demain refuseront d’y croire.
Que dira l’avenir ? quel long étonnement
Parmi les nations d’un tel événement !
Sort, qui nous mets ici, comme tu nous en ôtes !
Une des majestés humaines les plus hautes,
Quoi, François de Valois, ce prince au cœur de feu,
Rival de Charles-Quint, un roi de France, un Dieu,
— À l’éternité près, — un gagneur de batailles
Dont le pas ébranlait les bases des murailles,

Il tonne de temps en temps.

L’homme de Marignan, lui qui, toute une nuit,
Poussa des bataillons l’un sur l’autre à grand bruit,
Et qui, quand le jour vint, les mains de sang trempées,
N’avait plus qu’un tronçon de trois grandes épées,
Ce roi ! de l’univers par sa gloire étoilé,
Dieu ! comme il se sera brusquement en allé !
Emporté tout à coup, dans toute sa puissance,
Avec son nom, son bruit, et sa cour qui l’encense,
Emporté, comme on fait d’un enfant mal venu,
Une nuit qu’il tonnait, par quelqu’un d’inconnu !
Quoi ! cette cour, ce siècle et ce règne, fumée !
Ce roi, qui se levait dans une aube enflammée,
Éteint, évanoui, dissipé dans les airs !
Apparu, disparu, — comme un de ces éclairs !
Et peut-être demain, des crieurs inutiles,
Montrant des tonnes d’or, s’en iront par les villes,
Et crîront au passant, de surprise éperdu :
— À qui retrouvera François Premier perdu ! —
— C’est merveilleux ! —