Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Philosophie, tome I.djvu/107

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Dans la constitution actuelle de l’Europe, chaque état a son esclave, chaque royaume traîne son boulet. La Turquie a la Grèce, la Russie a la Pologne, la Suède a la Norvège, la Prusse a le grand-duché de Posen, l’Autriche a la Lombardie, la Sardaigne a le Piémont, l’Angleterre a l’Irlande, la France a la Corse, la Hollande a la Belgique. Ainsi, à côté de chaque peuple maître, un peuple esclave ; à côté de chaque nation dans l’état naturel, une nation hors de l’état naturel. Édifice mal bâti ; moitié marbre, moitié plâtras.


OCTOBRE

L’esprit de Dieu, comme le soleil, donne toujours à la fois toute sa lumière. L’esprit de l’homme ressemble à cette pâle lune, qui a ses phases, ses absences et ses retours, sa lucidité et ses taches, sa plénitude et sa disparition, qui emprunte toute sa lumière des rayons du soleil, et qui pourtant ose les intercepter quelquefois.


Avec beaucoup d’idées, beaucoup de vues, beaucoup de probité, les saint-simoniens se trompent. On ne fonde pas une religion avec la seule morale. Il faut le dogme, il faut le culte. Pour asseoir le culte et le dogme, il faut les mystères. Pour faire croire aux mystères, il faut des miracles. — Faites donc des miracles. — Soyez prophètes, soyez dieux d’abord, si vous pouvez, et puis après prêtres, si vous voulez.


L’église affirme, la raison nie. Entre le oui du prêtre et le non de l’homme, il n’y a plus que Dieu qui puisse placer son mot.


Tout ce qui se fait maintenant dans l’ordre politique n’est qu’un pont de bateaux. Cela sert à passer d’une rive à l’autre. Mais cela n’a pas de racines