Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Poésie, tome II.djvu/612

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Et tous ont leur martyre auprès de leur victoire. La vertu, c’est un livre austère et triomphant Où tout père doit faire épeler son enfant ; Chaque homme illustre, ayant quelque divine empreinte, De ce grand alphabet est une lettre sainte. Sous leurs pieds sont groupés leurs symboles sacrés, Astres, lyres, compas, lions démesurés, Aigles à l’œil de flamme, aux vastes envergures. — Le sculpteur ébloui contemple ces figures ! — Il songe à la patrie, aux tombeaux solennels, Aux cités à remplir d’exemples éternels ; Et voici que déjà, vision magnifique ! Mollement éclairés d’un reflet pacifique, Grandissant hors du sol de moment en moment, De vagues bas-reliefs chargés confusément, Au fond de son esprit, que la pensée encombre, Les énormes frontons apparaissent dans l’ombre !

IV

N’est-ce pas ? c’est ainsi qu’en ton cerveau, sans bruit, L’édifice s’ébauche et l’œuvre se construit ? C’est là ce qui se passe en ta grande âme émue Quand tout un panthéon ténébreux s’y remue ? C’est ainsi, n’est-ce pas, ô maître ? que s’unit L’homme à l’architecture et l’idée au granit ? Oh ! qu’en ces instants-là ta fonction est haute ! Au seuil de ton fronton tu reçois comme un hôte Ces hommes plus qu’humains. Sur un bloc de Paros Tu t’assieds face à face avec tous ces héros. Et là, devant tes yeux qui jamais ne défaillent, Ces ombres, qui seront bronze et marbre, tressaillent. L’avenir est à toi, ce but de tous leurs vœux, Et tu peux le donner, ô maître, à qui tu veux ! Toi, répandant sur tous ton équité complète,