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Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Poésie, tome XII.djvu/15

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Aie une muse belluaire,
Sinon tu seras dévoré.
Le ciel t'offre un double suaire,
L'un étoilé, l'autre azuré.
Va, revêts-les l'un après l'autre;
Et verse aux hommes, tour à tour,
Justicier sombre ou tendre apôtre,
Tantôt l'ombre et tantôt le jour.
Sois la nuit qui montre les astres;
Puis sois le soleil tout à coup,
Témoin des biens et des désastres,
Eclairant tout, éclipsant tout.
Car tu ressembles au prophète
Qui foudroyait et souriait;
Et ton âme de flots est faite
Comme l'océan inquiet.
Sois par l'aigle et par la chouette
Contemplé dans l'horreur des bois;
Sois l'immobile silhouette;
Sois la lueur et sois la voix.
Le psaltérion formidable
Vibre en tes mains, ô barde roi,
Esprit, poète, âme insondable!
Une aurore est derrière toi.