Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Poésie, tome XIV.djvu/321

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Et de ce que redit la cigale au grillon,
L’un chantant le foyer et l’autre le sillon.
Adieu la folle immense aux chansons infinies,
L’imagination, maîtresse des génies !
Adieu l’égarement dans les espaces bleus,
L’extase, et l’idéal, ce réel fabuleux,
Et les aspects profonds du rêve ! adieu la cime
Vue à travers l’écume énorme de l’abîme !
Adieu l’élan superbe et l’essor factieux!
Adieu. la joute avec les aigles dans les cieux !
Adieu les gnomes noirs aux mitres d’escarboucles,
Et les nymphes ayant des algues dans leurs boucles,
Et la fée, égrenant ses colliers de coraux !
On emploie à tracer des distiques, moraux,
Dignes d’être scandés aux écoles primaires,
Les doigts, qui caressaient la gorge des chimères.
Votre hippogriffe las demande l’abreuvoir ;
Et vos rimes n’ont plus d’assez bons yeux pour voir,
Sous l’étoile agrafée aux plis blancs de la nue,
Vénus au front divin sourire toute nue.

C’est fini. L’on devient bourgeois de l’Hélicon.
On loue au bord du gouffre un cottage à balcon.
On consent bien, du haut de sa raison morose,
A .faire encor des vers, pourvu qu’ils soient en prose.
De là l’épître. Hélas, le poète à vau-l’eau
Est un Orphée éteint qui finit en Boileau.