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Page:Hugo - Actes et paroles - volume 4.djvu/42

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PENDANT L’EXIL. — 1862.

ses travaux. La constitution qu’elle a élaborée ne donne point satisfaction aux vœux du poëte, puisqu’elle n’abolit pas la peine de mort, sinon pour délit politique. »

Non, il n’est pas trop tard.

En écrivant, je m’adressais moins au comité constituant, qui prépare, qu’au peuple, qui décide.

Dans quelques jours, le 7 décembre, le projet de constitution sera soumis au peuple. Donc il est temps encore.

Une constitution qui, au dix-neuvième siècle, contient une quantité quelconque de peine de mort, n’est pas digne d’une république ; qui dit république, dit expressément civilisation ; et le peuple de Genève, en rejetant, comme c’est son droit et son devoir, le projet qu’on va lui soumettre, fera un de ces actes doublement grands qui ont tout à la fois l’empreinte de la souveraineté et l’empreinte de la justice.

Vous jugerez peut-être utile de publier cette lettre.

Je vous offre, monsieur, la nouvelle assurance de ma haute estime et de ma vive cordialité.

V. H.

La lettre fut publiée, le peuple vota, il rejeta le projet de constitution.

Quelques jours après, Victor Hugo reçut cette lettre :

« … Nous avons triomphé, la constitution des conservateurs est rejetée. Votre lettre a produit son effet, tous les journaux l’ont publiée, les catholiques l’ont combattue. M. Bost l’a imprimée à part à mille exemplaires, et le comité radical à quatre mille. Les radicaux, M. James Fazy en tête, se sont fait de votre lettre une arme de guerre, et les indépendants se sont aussi prononcés à votre suite pour l’abolition. Votre prépondérance a été complète. Quelques radicaux n’étaient pas très décidés auparavant ; c’est un radical, M. Héroi, qui passe pour avoir déterminé les deux exécutions de Vary et d’Elcy, et le grand conseil, qui a refusé ces deux grâces, est tout radical.

« Cependant, en somme, les radicaux sont gens de progrès et, maintenant que les voilà engagés contre la peine de mort, ils ne reculeront pas. On regarde ici l’abolition de l’échafaud comme certaine, et l’honneur, monsieur, vous en revient. J’espère que