Page:Hugo - Légende des siècles, Hachette, 1920, 1e série, volume 1.djvu/383

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Apparaissait, dans l’ombre horrible, toute rouge ; On eût dit que, tandis qu’en bas on triomphait, Quelque archange vengeur de la plaine avait fait Remonter tout ce sang au front de la montagne. Chaque bande, à travers la brumeuse campagne, Dans des directions diverses s’enfonça ; Ceux-là vers Roncevaux, ceux-ci vers Tolosa ; Et les pillards tâtaient leurs sacs, de peur que l’ombre N’en fît tomber l’enflure ou décroître le nombre, La crainte du voleur étant d’être volé. Meurtre du laboureur et pillage du blé, La journée était bonne, et les files de lances Serpentaient dans les champs pleins de sombres silences ; Les montagnards disaient : « Quel beau coup de filet ! » Après avoir tué la plaine qui râlait, Ils rentraient dans leurs monts, comme une flotte au havre, Et, riant et chantant, s’éloignaient du cadavre.