Page:Hugo - Légende des siècles, Hachette, 1920, 1e série, volume 1.djvu/426

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C’est l’heure où les soldats, aux yeux lourds, aux fronts blêmes, La sieste finissant, se réveillent d’eux-mêmes. Le cavalier qui passe est habillé de fer ; Il vient par le sentier du côté de la mer ; Il entre dans le val, il franchit la chaussée ; Calme, il approche. Il a la visière baissée ; Il est seul ; son cheval est blanc.

Bon chevalier, Qu’est-ce que vous venez faire dans ce hallier ? Bon passant, quel hasard funeste vous amène Parmi ces rois ayant de la figure humaine Tout ce que les démons peuvent en copier ? Quelle abeille êtes-vous pour entrer au guêpier ? Quel archange êtes-vous pour entrer dans l’abîme ?

Les princes, occupés de bien faire leur crime, Virent, hautains d’abord, sans trop se soucier, Passer cet inconnu sous son voile d’acier ; Lui-même, il paraissait, traversant la clairière, Regarder vaguement leur bande aventurière ; Comme si ses poumons trouvaient l’air étouffant, Il se hâtait ; soudain il aperçut l’enfant ; Alors il marcha droit vers eux, mit pied à terre, Et, grave, il dit :

« Je sens une odeur de panthère, Comme si je passais dans les monts de Tunis,