Page:Hugo - Légende des siècles, Hachette, 1920, 1e série, volume 1.djvu/429

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Mes frères, n’est-ce pas ? C’est mou, c’est grelottant ; On ignore s’il voit, on ne sait s’il entend ; Un roi, ça ! rien qu’à voir ce petit, on s’ennuie. Moi, du moins, j’ai dans l’œil des flammes, et la pluie, Le soleil et le vent, ces farouches tanneurs, M’ont fait le cuir robuste et ferme, messeigneurs ! Ah ! pardieu, s’il est beau d’être prince, c’est rude : Avoir du combattant l’éternelle attitude, Vivre casqué, suer l’été, geler l’hiver, Être le ver affreux d’une larve de fer, Coucher dans le harnais, boire à la calebasse, Le soir être si las qu’on va la tête basse, Se tordre un linge aux pieds, les souliers vous manquant, Guerroyer tout le jour, la nuit garder le camp, Marcher à jeun, marcher vaincu, marcher malade, Sentir suinter le sang par quelque estafilade, Manger des oignons crus et dormir par hasard, Voilà. Vissez-moi donc le heaume et le brassard Sur ce fœtus, à qui bientôt on verra croître Par derrière une mitre et par devant un goître ! À la bonne heure, moi ! je suis le compagnon