Page:Hugo - La Fin de Satan, 1886.djvu/328

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Entends-moi dans ton rêve à travers l’anathème.
« Ne te courrouce point, père, puisque je t’aime !
« Le blessé ne hait pas la main qui le soutient ;
« L’affamé n’a jamais maudit celui qui vient
« Disant : Voici du pain et de l’eau. Bois et mange.

« Oh ! quand j’étais mêlée à tes ailes, quel ange
« Que Satan, dans l’aurore et dans l’immensité !
« Dieu se nommant Bonté, tu t’appelais Beauté.
« Ta chevelure était blonde et surnaturelle,
« Et frissonnait splendide, et laissait derrière elle
« Une inondation de rayons dans la nuit !
« L’abîme était par toi comme par Dieu conduit.
« Un jour les éléments te prirent pour Lui-même ;
« Comme tu te dressais avec ton diadème
« Sur le ciel, de ton lustre effrayant envahi,
« L’air dit : Emmanuel ; et l’onde : Adonaï ;
« Ton char faisait jaillir des mondes sous sa roue.
« Près de toi, Raphaël, Gabriel, qui secoue
« Un météore épars en flammes sur son front,
« Michel, dont la clarté jamais ne s’interrompt,
« Ithuriel, qui mêle aux rayons les dictames,
« Stellial, Azraël, porte-flambeau des âmes,
« N’étaient plus que l’essaim confus de la forêt ;
« Un resplendissement de blancheur t’entourait ;
« Et l’aube en te voyant s’écriait : je suis noire ;
« Tu passais au milieu d’un ouragan de gloire ;
« Les éthers t’attendaient pour devenir azurs ;
« Les univers naissaient, prodigieux et purs,
«