Page:Hugo - La Fin de Satan, 1886.djvu/329

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Avec des millions de fleurs et d’étincelles,
« Dans un rythme marqué par tes battements d’ailes ;
« Tu faisais, en fixant sur eux ton œil charmant,
« Reculer les soleils dans l’éblouissement ;
« Tu flamboyais, candeur et force ; un lys archange !
« Comme après le héros s’avance la phalange,
« A ta suite marchaient les constellations ;
« L’ombre pleurait d’amour quand nous la traversions ;
« La nuit, tu te levais dans un triomphe d’astres ;
« Et les dômes divins et les sacrés pilastres,
« Et les éternels cieux et l’éden nouveau-né,
« T’adoraient dans ta joie immense, infortuné !

« Hélas, dès qu’en ce bagne, où nul regard ne plonge,
« Tu fus précipité, Satan, tu fis ce songe
« De te venger, démon géant, sur l’infini !
« Prés de l’ange proscrit tu mis l’homme banni ;
« Tu fis tomber Adam et tu fis déchoir Eve ;
« Tu voulus frapper Dieu dans le germe et la sève,
« Dans l’enfant, dans le nid des bois, dans l’alcyon ;
« Seul, à jamais muré sous la création,
« Tu devins, dans l’horreur, le grand rêveur funeste ;
« Dans les vierges forêts tu fis sortir la peste
« De l’épaisseur charmante et terrible des fleurs ;
« Avec les voluptés tu forgeas les douleurs ;
« Tu te mêlas à l’être auguste qui gouverne ;
« L’espace se remplit d’un esprit de caverne ;
« Tu dis à l’Eternel : à nous deux maintenant !
« Tu souillas l’infini rien qu’en l’espionnant.
«