Page:Hugo - La Fin de Satan, 1886.djvu/63

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II

Et dans le même bois et de l’autre côté
Un lépreux s’écriait :

                           Nature ! immensité !
Etoiles ! profondeurs ! fleurs qu’en tremblant je nomme,
Ne maudissez pas que moi ! soyez bonnes pour l’homme !
O Dieu, quand je suis né, vous ne regardiez pas.
La lèpre, rat hideux de la cave trépas,
Me ronge, et j’ai la chair toute déchiquetée.
Je suis la créature immonde et redoutée.
La terre ne m’a pris que pour me rejeter.
Les buissons ont pitié de me voir végéter ;
Ce qu’ils ont en bourgeons sur moi croît en pustules.
Ma peau, quand je suis nu, fait peur aux tarentules.
De loin, au chevrier, au pâtre, au laboureur,
J’apparais, spectre, avec le masque de l’horreur.
La lèpre erre sur moi comme un lierre sur l’orme.
La sève qui, gonflant tout de son flot énorme,
Emplit de lionceaux les antres, les doux nids
De soupirs, de rameaux les arbres rajeu