Aller au contenu

Page:Hugo Rhin Hetzel tome 2.djvu/20

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

prés, je catalogue des moucherons et je collationne des brins d’herbe, je me pénètre de la grandeur de Dieu, et je serai toujours charmé de rencontrer à tout bout de champ cet emblème bruyant de la petitesse des hommes, ce charlatan s’essoufflant sur sa grosse caisse, ce Bobino, ce Bobèche, cette ironie ! Le charlatan se mêle à mes études et les complète ; je fixe cette figure avec une épingle dans mon carton comme un scarabée ou comme un papillon, et je classe l’insecte humain parmi les autres.

G― m’entraîna donc vers le groupe de maisons d’où venait le bruit ; — un assez chétif hameau qui se nomme, je crois, Petit-Sou, ce qui m’a rappelé ce bourg d’Asculum, sur la route de Trivicum à Blindes, lequel fit faire un rébus à Horace :

Quod versu dicere non est,
Signis perfacile est.

Asculum en effet ne peut entrer dans un vers alexandrin.

C’était la fête du village. La place, l’église et la mairie étaient endimanchées. Le ciel, lui-même, coquettement décoré d’une foule de jolis nuages blancs et roses, avait je ne sais quoi d’agreste, de joyeux et de dominical. Des rondes de petits enfants et de jeunes filles, doucement contemplées par des vieillards, occupaient un bout de la place qui était tapissé de gazon ; à l’autre bout, pavé de cailloux aigus, la foule entourait une façon de tréteau adossé à une manière de baraque.

Le tréteau était composé de deux planches et d’une échelle ; la baraque était recouverte de cette classique toile à damier bleu et blanc qui rappelle des souvenirs de grabat et qui, se faisant au besoin souquenille, a fait donner le nom de paillasses à tous les valets de tous les charlatans. À côté du tréteau s’ouvrait la porte de la baraque, une simple fente dans la toile ; et au-dessus de cette porte, sur un écriteau blanc orné de ce mot en grosses majuscules noires :

MICROSCOPE

fourmillaient, grossièrement dessinés dans mille attitudes fantastiques, plus d’animaux effrayants, plus de monstres