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Page:Hugo Rhin Hetzel tome 3.djvu/215

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Mayence avait une nationalité distincte, tranchée, hautaine et jalouse. L’électorat de Mayence pesait en Europe. Aujourd’hui elle a garnison étrangère. Elle n’est plus qu’une sorte de corps de garde où l’Autriche et la Prusse font faction, l’œil fixé sur la France.

Mayence avait gravé en 1135 sur les portes de bronze que lui avait données Willigis les libertés que lui avait données Adalbert. Elle a encore les portes de bronze, mais elle n’a plus les libertés. Dans le plus profond de son histoire, Mayence a des souvenirs romains ; le tombeau de Drusus est chez elle. Elle a des souvenirs français ; Pépin, le premier roi de France qui ait été sacré, a été sacré, en 750, par un archevêque de Mayence, saint Boniface. Elle n’a point de souvenirs hessois, à moins que ce ne soit celui-ci : au seizième siècle, son territoire fut ravagé par Jean Le Batailleur, landgrave de Hesse.

Ceci montre comment le congrès de Vienne a procédé. Jamais opération chirurgicale ne s’est faite plus à l’aventure. On s’est hâté d’amputer la France, de mutiler les populations rhénanes, d’en extirper l’esprit français. On a violemment arraché des morceaux de l’empire de Napoléon ; l’un a pris celui-ci, l’autre celui-là, sans regarder même si le lambeau par hasard ne souffrait pas, s’il n’était pas séparé de son centre, c’est-à-dire de son cœur, s’il pouvait reprendre vie autrement et se rattacher ailleurs. On n’a posé aucun appareil, on n’a fait aucune ligature. Ce qui saignait il y a vingt-cinq ans saigne encore.

Ainsi on a donné à la Bavière quelques anneaux de la chaîne des Vosges, vingt-six lieues de long sur vingt et une de large, cinq cent dix-sept mille quatre-vingts âmes, trois morceaux de nos trois départements de la Sarre, du Bas-Rhin et du Mont-Tonnerre. Avec ces trois morceaux, la Bavière a fait quatre districts. Pourquoi ces chiffres et pas d’autres ? Cherchez une raison ; vous ne trouverez que le caprice.

On a donné à Hesse-Darmstadt le bout septentrional des Vosges, le nord du département du Mont-Tonnerre, et cent soixante-treize mille quatre cents âmes. Avec ces âmes et ces Vosges, la Hesse a fait onze cantons.