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LE TRÉSOR DE BIGOT

Un tertre apparaissait, bien visible, avec au milieu, une pierre taillée en forme de tomahawk.

Jules Laroche allait se pencher sur le tertre, quand il entendit la voix de Madeleine crier dans un grand accent de détresse :

— Maman, maman ! Au secours, monsieur Jules !

Cri de fille aimante qui, dans le malheur, appelle d’abord sa mère instinctivement !

Qui donc avait enlevé la jeune fille ?

Immédiatement, le détective fut sûr que c’était la bande de Jean Labranche qui faisait le coup, espérant que Madeleine entre leurs mains, le père Latulippe ne révélerait pas son secret.

Voler au secours de la jeune fille ! Ce fut sa première pensée. N’occupait-elle pas déjà peut-être une grande place dans son cœur ?

Mais allait-il laisser la fosse du noyé seule, sans gardien, à la merci des voleurs ? car le trésor était là. Il n’en doutait point.

— Tricentenaire, dit-il hâtivement, tu vas rester ici et surveiller cette fosse. Si quelqu’un tente de s’en approcher, fais feu et blesse, tue, s’il le faut. Je t’enverrai du renfort de Lévis. Vous, père Latulippe, venez avec moi.

Il dut traîner derrière lui le vieillard que son grand âge empêchait de courir. Mais il avait agi si rapidement que quand il se lança en auto à la poursuite des ravisseurs, leur machine venait à peine de disparaître dans un nuage de poussière.


XVII

EN CANOT AUTOMOBILE


— Père Latulippe, quand nous tournerons le coin de la rue St-Georges et de la Côte du Passage, à Lévis, vous sauterez à bas de l’auto et vous vous rendrez au poste de police. Là, vous mobiliserez tous les agents disponibles et vous retournerez à la fosse du noyé où les agents prêteront main-forte à Tricentenaire dans la garde du Trésor.

Jules Laroche prononçait ces paroles pendant que son automobile filait à une vitesse vertigineuse sur la route Lévis-Jackman. De nombreux touristes arrêtaient leurs machines et les regardaient passer, curieux et anxieux.

Les ravisseurs étaient visibles au loin quand la route ne faisait pas de détours brusques.

— Nous gagnons du terrain, disait souvent le détective.

Ils entrèrent dans Lévis sans ralentir. Jules dut user de toute son expérience pour ne pas capoter en tournant le coin de la rue St-Georges, à peine 200 pieds en arrière des bandits.

Mais il perdit son avance quand il laissa le père Latulippe au poste de police.

Les deux autos traversèrent Lévis et gagnèrent Lauzon par la rue Wolfe. Jules eut l’ennui de voir un cycliste policier à ses côtés, lui commandant d’arrêter. Mais il lui fit voir son insigne de détective et continua.

Au bout de la ville de Lauzon, l’auto des ravisseurs ralentit, tourna et descendit une petite côte raide qui conduit à la grève de Gilmour.

Jules vit les bandits sauter dans un yatch, emportant Madeleine.

Que faire ?

Il y avait un canot-automobile ancré à quelques pieds du rivage. Le détective se lança à l’eau. Il ne savait pas nager mais il n’y avait que 4 pieds d’eau au-dessous du canot.

Y avait-il assez d’essence pour lui permettre de suivre ? Le moteur fonctionnerait-il ?

Questions angoissantes !

Enfin, il eut la joie de constater que les deux réponses étaient affirmatives et il partit.

Le canot devait appartenir à un maniaque de vitesse, car il dévorait l’espace, effleurant à peine l’eau, comme un hydroplane.

Le yatch se dirigeait vers l’île d’Orléans, en face.

Quand il fut près du rivage, le détective vit les bandits atterrir sur la grève et se sauver vers le chemin qui contourne l’île.

Quelques instants plus tard, il atterrissait lui-même. La chance l’attendait sur la route.

Comme il y arrivait, une automobile passa.

Il la héla et y monta :

— Une fille a été enlevée, dit-il au seul occupant de la voiture. Aidez-moi à poursuivre ses ravisseurs. Ils s’en vont en avant. Et si vous êtes capable de faire du 75 à l’heure, faites-le.

L’autre, un jeune homme, lui dit alors rapidement qu’il le reconnaisait pour le détective Laroche et que son automobile était à sa disposition. Immédiatement il donna à son char toute l’essence qu’elle pouvait brûler.

La course ne fut pas longue.

Les bandits ne s’étaient sans doute pas attendus d’être poursuivis jusque sur l’île, car ils filaient dans un char bon marché, pratiquement incapable de vitesse.

Quand Jules ne fut plus qu’à cent pieds en arrière, il sortit son revolver et creva deux