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ENQUÊTE

leur mauvaise humeur. Mais est-ce ma faute si personne ne veut s’occuper de leurs écrits ! Et puis, je pense qu’ils sont tout à fait incapables de goûter mon livre dans son essence. Le Pèlerin rompt définitivement avec la période du symbolisme que j’appellerai de transition, il entre dans la phase vraie de la manifestation poétique que je rêve.

Eux sont restés figés dans trois ou quatre procédés de la première heure ; ils sont, comme symbolistes, ce que Casimir Delavigne et Alexandre Soumet étaient comme romantiques le lendemain de la bataille d’Hernani. Les poètes selon la vieille formule, ceux qui avaient du talent, l’ont prouvé autrefois lorsqu’ils étaient, eux aussi, des novateurs ; l’avenir leur rendra la justice due. Pour le moment, je n’ai que faire de leur approbation ou de leur désapprobation. Quant à leurs élèves, qui travaillent dans le poncif d’hier, le plus poncif de tous les poncifs, tant pis pour eux. Et, pour les romanciers naturalistes, ils sont trop illettrés et trop absurdes, à la vérité.

— C’est une école, n’est-ce pas, que vous entendez faire ?

— Entendons-nous. Il n’y a pas d’école dans le sens strict du mot. Chacun garde son individualité. On ne se dit pas : Nous allons former une école ; mais il y a, fatalement, convergence d’individualités, d’où manifestation collective. Et ne vous y trompez pas ! C’est toujours une manifestation collective qui produit les