un détail, un tout petit détail : les soixante et dix éditions de l’Argent ! Oui, ce monceau de volumes de Zola enlevés en quelques jours, n’est-ce pas une preuve — un joli « symbole » de succès et de vitalité ? Qu’en pense M. Moréas, lui qui, j’ose le croire, ferait encore ses choux gras des modestes trois mille exemplaires vendus de Madame Meuriot ?
» Mais, mon cher confrère, laissons bien vite ces petitesses, ces misérables questions de vente, de succès immédiat, qui ne prouvent pas tout. Le naturalisme, en somme, n’est qu’une ramification, dans le domaine de la littérature, du large courant général qui emporte le siècle vers plus de science, vers plus de vérité et, sans doute aussi, plus de bonheur. Les vrais naturalistes, les purs, ne sont donc pas six, ni deux, ni un : à proprement parler, il n’en existe pas encore. Mais ils seront légion, car la voie est large, le but haut et lointain, et c’est dans cette direction que peineront à leur tour nos enfants et les enfants de nos petits-enfants. Quant à nous-mêmes, et à ceux de nos aînés que nous aimons, en nous efforçant de les continuer, ni les uns ni les autres ne sommes encore véritablement des naturalistes. Le romantisme, dont nous sommes tous sortis, est encore là, trop près. Nul de nous n’est jusqu’ici parvenu à purger complètement son sang du virus romantique héréditaire.
» — Soit, me direz-vous. Mais s’il n’y a que des naturalistes-précurseurs jusqu’ici, les psychologues… que