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rapports anatomiques

hardis, surmontant les difficultés de l’espace et de la gravitation, auraient rapporté de cette planète distante, conservé, je suppose, dans un baril de rhum, pour le soumettre à notre examen. Nous nous accorderions tous, du premier coup, à le placer parmi les mammifères vertébrés ; sa mâchoire inférieure, ses molaires et son cerveau ne laisseraient aucune place au doute quant à la situation systématique du genre nouveau parmi les mammifères dont les petits sont nourris pendant la gestation à l’aide d’un placenta, c’est-à-dire parmi ceux que l’on appelle les mammifères placentaires.

De plus, l’étude la plus superficielle nous convaincrait rapidement que, parmi les ordres de mammifères à placenta, ni les baleines, ni les ongulés, ni les paresseux, ni les fourmiliers, ni les carnassiers, chat, chien, ours, ni, moins encore, les rongeurs, rats et lapins, ni les taupes insectivores, ni les hérissons, ni les chauves-souris, ne pourraient réclamer notre « Homo » comme un des leurs.

Il ne resterait alors pour la comparaison qu’un seul ordre, celui des singes (en se servant de ce mot dans son sens le plus large), et le problème en question se réduirait de lui-même à celui-ci : l’homme est-il tellement différent de chacun des singes, qu’il faille constituer un ordre pour lui seul ? ou bien diffère-t-il moins d’eux que les singes ne diffèrent l’un de l’autre, et, en conséquence, doit-on le classer avec les singes, dans un même ordre ?

Étant heureusement dégagé de tout intérêt personnel, réel ou imaginaire dans les résultats d’une telle enquête, nous pèserions les arguments de part et d’autre avec autant de quiétude magistrale, que s’il était question d’un nouvel opossum. Nous nous efforcerions de déterminer, sans nous soucier de les exagérer ou de les amoindrir, tous les caractères par lesquels notre nouveau mammifère différerait des