Page:Huysmans - Croquis parisiens.djvu/194

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cuits ; généralement, on les lui apportait presque crus et il s’efforçait d’éponger avec de la mie de pain, de recueillir avec une petite cuiller le jaune qui se noyait dans des tas de glaires. C’était mauvais, c’était cher et surtout c’était attristant. En voilà assez, se dit M. Folantin, essayons d’autre chose.

Mais partout il en était de même ; les inconvénients variaient en même temps que les râteliers ; chez les marchands de vins distingués, la nourriture était meilleure, le vin moins âpre, les parts plus copieuses, mais en thèse générale, le repas durait deux heures, le garçon étant occupé à servir les ivrognes postés en bas devant le comptoir ; d’ailleurs, dans ce déplorable quartier, la boustifaille se composait d’un ordinaire, de côtelettes et de biftecks qu’on payait bon prix parce que, pour ne pas vous mettre avec les ouvriers, le patron vous enfermait dans une salle à part et allumait deux branches de gaz.

Enfin, en descendant plus bas, en fréquentant les purs mannezingues ou les bibines de dernier ordre, la compagnie était répulsive et la saleté stupéfiante ; la carne fétidait, les verres avaient des ronds de bouches encore marqués, les couteaux était dépolis et gras et les couverts conservaient dans leurs filets le jaune des œufs mangés.

M. Folantin se demanda si le changement était