Page:Huysmans - En menage - ed Fasquelle 1922.djvu/102

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la loi, risquait d’être ramenée de force chez son mari, traînée devant les tribunaux. C’était la honte pour elle et pour sa famille, c’était son aventure racontée dans tous les journaux avec son nom et celui de son père. Lui-même ne se relèverait pas d’un tel scandale, ses parents le chasseraient. Ah ! il fallait bien réfléchir avant de faire un semblable coup de tête ! Et puis, quelle vie serait la leur ! il ne pouvait quitter les siens, il n’avait aucune fortune personnelle, c’était la misère noire qu’ils se préparaient. Oh ! il ne pouvait y avoir de doute, son père serait inflexible et lui rognerait les vivres. Il entrerait seulement, là, maintenant, verrait une femme chez son fils, qu’il’ ne les laisserait certainement pas sortir vivants de la chambre.

Il lui tenait la main, lui exposait piteusement sa situation, répétait plusieurs fois de suite les mêmes arguments, épiait sur sa face l’impression qu’ils produisaient, insistait de préférence sur la honte des familles, sur les poursuites de la justice.

Toute blanche, elle l’écoutait, ne soufflait mot.

— Tu comprends, reprenait-il, la mine pleurarde, mourant de peur qu’elle ne restât chez lui, craignant qu’elle ne comprit enfin qu’il n’avait eu qu’un but, en, la séduisant, se garder de l’amour sur la planche, sans frais ; tu comprends, tout ce que je te dis là, c’est dans ton intérêt, peu m’importe à moi que ma vie soit brisée, je t’aime assez pour cela ! Mais en fin de compte tout n’est pas désespéré. Ton mari aurait pu prendre la chose plus mal ; il te pardonnerait peut-