Page:Huysmans - En menage - ed Fasquelle 1922.djvu/150

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le prétexte à inventer pour une visite était si facile ! Il lui pardonnerait ; une fois entrée chez lui, ça se ferait tout naturellement ; l’on arriverait bien à s’accorder et à s’entendre !

Puis il avait un soubresaut et, dégrisé, il s’injuriait, et, retombant dans ses pensées qui, détachées maintenant de l’image autour de laquelle elles gravitaient, divergeaient peu à peu, s’écartaient de Berthe et tournant malgré tout dans le même cercle, revenaient à leur point de départ, à la femme, il songeait alors à la période de sa vie restée jusqu’ici dans l’ombre, il évoquait ses anciennes liaisons et invinciblement il s’arrêtait à Jeanne, à une maîtresse qu’il avait possédée quelques années avant son mariage.

C’était la première fois depuis longtemps que ce souvenir l’assaillait. Elle seule, était demeurée dans un coin de sa cervelle comme une brave et curieuse fille, une petite ouvrière un peu incompréhensible, très corrompue ou très naïve, mais, dans tous les cas, attachée où elle broutait et tendre. Ils s’étaient fâchés pour une vétille, et fière et susceptible comme elle était, jamais plus depuis il ne l’avait revue.

Son visage, il se le rappelait à peine. Autant la figure de la jeune fille avec laquelle il avait filé un amour chaste, se dressait devant ses yeux, très nette, avec cette puissance de vision que prennent les souvenirs de l’extrême jeunesse, autant la physionomie de cette femme qui avait couché près de lui, pendant