Page:Huysmans - En menage - ed Fasquelle 1922.djvu/329

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se sentait, pour le moment, un grand bien-être ; la crainte d’être froidement reçu se dissipait. La bonne humeur de Mélie qui faisait danser, de temps à autre, sa gorge dans un gros rire, le réjouissait. Il se trouvait comme chez lui. Les jambes déployées, toutes droites, sous la table, le derrière glissé jusqu’au rebord de la chaise, la tête presque appuyée sur le dossier, les mains dans les poches, il reposait, engourdi par la victuaille absorbée et par le vin.

Mélie apporta la lampe, et la salle à manger avec ses quelques faïences pendues aux murs, son petit poêle où un vieux pot de Delft se dressait, le col allumé par les flammes d’une pivoine, sa nappe maintenant marbrée de rose par le reflet des verres à moitié vides, ses plats jetant à certains coins des paillettes de feux sous la lumière rabattue sur la table et sautant en rond au plafond, au-dessus du verre de lampe, sembla honnête et gaie, amicale et coquette à André qui, regardant, tour à tour, Mélie et Cyprien. murmura :

— Vous avez eu de la chance de vous rencontrer, vous etes heureux, vous !

La grosse fille sourit.

— C’est bien compliqué, dit-elle, le tout, voyez-vous, monsieur André, c’est que les braves gens se rejoignent. Une fois que c’est arrivé, eh bien, dame, on se dit, le ménage est là, y a pas, faut que chacun tire sur la bricole et l’on s’attelle et l’on pousse et hue donc, ça marche !

Et puis, un homme, c’est perdu quand c’est seul ;