Page:Huysmans - En menage - ed Fasquelle 1922.djvu/357

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autres, seulement j’ai deviné le mystère des existences vécues dans les banlieues. Je me suis vu, ouvrant la fenêtre, le matin, tapotant avec inquiétude sur mon baromètre, descendant sous un chapeau de paille, en chemise, le dos barré par une bretelle, pour tailler avec le sécateur mes plantes ; je me suis vu enfin, le dimanche, les jambes pendant sur le talus des remparts, utilisant ma lorgnette de spectacle à contempler l’horizon, discutant pour la centième fois avec ma femme qui ravaude en bâillant près de moi, sur le nom du village que figure un petit pâté blanc, là-bas, dans le ciel, au loin.

Cette vision de ma longue personne dans un maigre paysage m’a guéri de ces élans vers la nature parisienne que j’adore quand je m’y promène, mais que je prendrais infailliblement en haine si je devais y habiter seulement pendant un terme. Mais, d’ailleurs, je suis bien tranquille, tu reviendras, apitoyé par l’ennui de ta femme, et lassé toi-même par l’isolement, demeurer à un troisième étage, dans le centre de Paris, comme moi !

Le visage d’André se rembrunit. Il se rappelait les plaintes de Berthe, déplorant la rareté des provisions, le départ précipité des bonnes, d’un quartier privé de bastringues et de troupes. Il eut peur que cette halte dans les tracas de sa vie ne fût point définitive, et il appréhenda de reprendre peu à peu, sous l’impulsion de sa femme, sa course longtemps interrompue au travers des salons et des bals. Main-