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Page:Huysmans - En menage - ed Fasquelle 1922.djvu/62

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— C’est toute ma jeunesse, une jeunesse d’humiliation et de panne qui est là, disait-il. Avec une mère veuve et sans le sou, une bourse au lycée, un rabais à la pension, je ne pouvais réclamer quand la viande putridait et que des cafards submergés dansaient dans l’abondance. Ah ! j’étais sûr de mon affaire ! lorsque le domestique portait au patron les assiettes et lui soufflait, à mi-voix, le nom des élèves qu’il allait servir, l’assiette me revenait avec des rogatons et des boules de graisse, des arêtes ou des os ! je mangeais peu et mal et j’étais régulièrement désigné pour réciter la prière. – Avec cela, des punitions, en veux-tu, en voilà – 100 vers pour les autres et 500 pour moi. Pas de compliments, quand j’étais premier, un air rogue lorsque j’étais troisième – méprisant et furieux si j’étais onzième. – Des pièces et des béquets à toutes mes bottines. Des gilets taillés dans les vieux gilets qu’un oncle abandonnait à ma mère, pour moi, – un uniforme de dimanche toujours fané, faute de pouvoir en renouveler les pièces. Les camarades riches me lâchaient à la porte du bahut, les jours de sortie, parce que je n’avais pas, comme eux, des cravates d’azur et des cols droits. – Je ne salivais pas sur des manilles, moi ! je suçais des bouts coupés à un sou. Voilà ce que je vois, lorsque je me retourne, un cortège lamentable de misères et d’insultes, des tombereaux de voirie, des vices de maisons centrales et des chiourmes abjectes !

Et cependant, je n’étais ni un crétin, ni un chahuteur – non – je n’étais rien – j’étais médiocre sim-