qu’elle allât. Ses longues flânes dans les magasins étaient devenues impossibles ; les ficelles qui réussissaient facilement avec son père, n’avaient aucune chance d’être acceptées par une femme économe comme était sa tante. Elle dut s’accommoder de la modique pension que son oncle et tuteur lui accorda pour ses frais de toilette.
Cette sujétion lui pesait et elle n’était compensée par aucun avantage. Avec son père, elle sortait peu, parce qu’il était presque paralysé ; avec son oncle, elle ne sortit guère plus et elle dut subir les regrets plaintifs de ces petits bourgeois, enragés malgré tout de leur situation médiocre, s’efforçant quand même de représenter, mangeant de la carne et buvant du râpé, pour donner une soirée et se mieux vêtir. Habituée à un certain confortable, elle vécut dans une gêne mesquine et plate.
Elle fut prise de pitié devant ce vin que l’on achetait au litre chez un épicier et que l’on transvasait dans des carafes pour la table ; elle eut le dégoût de cette viande de bas étage, prétentieusement parée, de ces poissons défraîchis et couchés néanmoins sur une serviette ; elle eut un sourire de mépris quand, profitant d’une gratification, les Désableau firent poser un timbre à leur porte d’entrée. Le coup impérieux du timbre leur paraissait aristocratique, propre à les rehausser dans l’estime des gens qui le faisaient vibrer. Seulement, comme la cuisine et la salle à manger étaient séparées du vestibule par un long couloir, ils avaient, ne pouvant