Page:Huysmans - En rade.djvu/233

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Cette idée qu’il allait enfin quitter Lourps, rentrer à Paris, retrouver son intérieur, son cabinet de toilette, ses bibelots, ses livres, le transporta ; mais quoi ? ce départ ferait-il taire la psalmodie de ses pensées tristes et décanterait-il cette détresse d’âme dont il accusait la défection de sa femme d’être la cause ? Il sentait bien qu’il ne pardonnerait pas aisément à Louise de s’être éloignée de lui au moment où il aurait voulu se serrer contre elle. Puis la terrible question de la vie en commun était là. Jusqu’alors, ils avaient vécu librement, dans des chambres séparées, au large ; ils s’étaient évité l’embarras des détails ridicules, la honte des soins cachés. Au château il avait bien fallu demeurer ensemble, se coucher et se lever dans la même pièce et, si bête que cela fût, il jugeait maintenant sa femme diminuée, éprouvait une gêne, presque une aversion pour le contact de son corps, à certains jours.

Dès le retour à Paris, il allait chercher un pauvre logement et il ne pouvait raisonnablement espérer qu’il aurait, comme par le passé, sa chambre ; cette perspective de ne plus respirer seul, au moment du repos, l’atterra. Puis il savait bien que si l’homme abdique pour les tribulations intimes de la femme toute répugnance, c’est parce que, semblable à un milieu réfringent qui déforme la réalité des choses,