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derrière eux, les ailes grandes ouvertes, présentant, l’un le casque du duc, l’autre l’écu armorié de la princesse.

Ce mausolée était plus ouvragé que le premier, les sculptures plus surchargées de volutes, de chicorées, de fleurons ; le souvenir s’attestait aussitôt des paraphes, des frisures, des boucles de l’ornementation de l’église de Brou, cette fin du gothique qui, après s’être corrompu, en vieillissant, rejette sa robe de pierre pour mourir, impur, nu, sous un linceul de dentelles.

Les fauves de ce monument étaient des fauves de pendules et il ne leur manquait sous la patte qu’une boule ; les princes et la princesse, gisant sur lame, ne différaient pas, par leur attitude conventionnelle, des statues funéraires de l’époque. La beauté de l’œuvre n’était point dans ces froides effigies ni même dans ces anges blonds et charmants, mais conçus, eux aussi, d’après une formule que nous retrouvons chez la plupart des primitifs des Flandres, elle résidait dans les figurines debout sous les arcades naines du cloître.

Elles avaient dû portraiturer, toutes, d’abord, des religieux de différents ordres se lamentant sur le trépas des princes ; elles devaient se composer exclusivement de « plorants », mais la verve des ouvriers d’images avait rompu le cadre restreint de la commande et, au lieu de gens en larmes, ils avaient saisi l’humanité monastique de leur temps, triste ou gaie, flegmatique ou fervente ; et, à vrai dire, la plupart de leurs statuettes ne songeaient à rien moins qu’à déplorer le décès des ducs.

Ils avaient, en tout cas, réalisé des merveilles d’observation, fixé des maintiens pris sur le vif, des postures croquées au vol ; aucune de ces figurines si expressives,