Page:Huysmans - L'Oblat.djvu/292

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée


Le Souverain Pontife les déchaînera-t-il ? j’en doute ; il pardonnera et il aura évangéliquement raison ; seulement où toutes ces défaites résignées nous mènent-elles ?

— Ah ! s’écria Mme Bavoil, en secouant la tête, laissons ces désolantes histoires ; ne songeons qu’à Jésus que l’on va crucifier ; l’heure des ténèbres est proche ; allons le consoler.

— En supposant que nous en soyons dignes ! dit Durtal qui mit son chapeau et enfila son caban.

Une fois installé dans l’église, il oublia les tristesses de l’heure présente. La divine liturgie l’enlevait, planant si haut, loin de nos boues ! Et il embrassait d’un coup d’œil le panorama de la terrible semaine, de la semaine « peineuse » telle que la qualifiait le moyen-age.

Avant de gravir ces jours qui conduisaient en de brèves étapes au sommet du Golgotha, au pied même du gibet, l’église montrait, dans l’evangile de la passion, le fils de Dieu réduit à s’enfuir et à se cacher, afin de n’être pas lapidé par les Pharisiens ; — et pour exprimer cette humiliation, elle couvrait de voiles de couleur violette ses statues et ses croix. Une semaine s’écoulait encore et soudain, pendant quelques instants, sa détresse s’interrompait, à la fête des Palmes.

La veille même, l’Epître de la messe énonçait les épouvantables malédictions que proférait Jérémie, cette préfigure du Christ, contre les juifs ; et, le lendemain, en de magnifiques offices, au cri de « l’hosanna », au chant triomphal du « Gloria Laus », Jésus s’avançait, monté sur le petit de l’ânesse prédit par Zacharie, et il entrait, assourdi par les vivats du peuple, dans cette