Page:Huysmans - L'Oblat.djvu/84

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charges de cavalerie dans les pins ; la terre mouillée, saturée de feuilles, sentait le marcassin ; les fleurs s’espaçaient, les fourrés devenaient moins drus, des branches de bois mort jonchaient le sol.

On y était loin de tout, dans ces allées à bréviaire, ainsi que les appelait Durtal, et elles paraissaient, en effet, tracées pour y méditer les vies des saints condensées dans les leçons de ces livres.

Leur charme consistait à n’avoir été ni nettoyées, ni peignées ; les clairières, les routes sous bois, contenaient les plantes les plus diverses, apportées là, ou par les oiseaux ou par le vent ; et, aux saisons différentes, Durtal y pratiquait des fouilles, découvrait de ces lunelles, nommées vulgairement monnaie du pape, dont les tiges balancent de vertes rondelles marquées de points de dominos, par l’arrêt des graines et qui deviennent des disques de parchemin argenté, en se séchant ; des basilics puant le graillon de cuisine, le roux, et aussi on ne sait quelle odeur affadie de mélisses et de sauges ; des bourraches rugueuses et velues avec des fleurs en étoile, d’un bleu de ciel polaire, exquis ; des bouillons-blancs se dressant avec leurs feuilles pâles et leurs fleurs d’un jaune délavé de soufre, en forme de pagodes de l’Inde, mais, toutes, déchiquetées, saupoudrées ainsi que d’une farine, par une chenille semblable à la croûte d’un bondon gras, une chenille qui sans arrêt les émiette et les ronge ; il y avait de tout dans ces coins abandonnés de nature ; des églantiers et des ronces ; des laiterons dont les tiges, pleines d’un jus de lait de chaux, infectent les doigts qui les touchent, et des pétasites, aux feuilles monumentales, aux formes décoratives, dont les fleurs étaient