Page:Huysmans - Là-Bas, Tresse & Stock, 1895.djvu/79

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l’alchimie fût demeurée vaine, il ne diffère pas bien sensiblement des barons de son temps.

Il les dépasse en faste de débauches, en opulence de meurtres et voilà tout. Et c’est vrai cela ; lis Michelet. Tu y verras que les princes étaient à cette époque des carnassiers redoutables. Il y a là un sire de Giac qui empoisonne sa femme, la met à califourchon sur son cheval et l’entraîne, bride abattue, pendant cinq lieues, jusqu’à ce qu’elle meure. Il y en a un autre dont j’ai perdu le nom, qui empoigne son père, le traîne nu-pieds, dans la neige, puis le jette tranquillement jusqu’à ce qu’il crève, dans une prison en contre-bas. Et combien d’autres ! J’ai sans succès cherché si, pendant les batailles et les razzias, le Maréchal avait accompli de sérieux méfaits. Je n’ai rien découvert, sinon un goût déclaré pour la potence ; car il aimait à faire brancher tous les Français relaps, surpris dans les rangs des Anglais ou dans les villes peu dévouées au Roi.

Le goût de ce supplice, je le retrouverai, plus tard, au château de Tiffauges.

Enfin, pour terminer, ajoute à toutes ces causes un orgueil formidable, un orgueil qui l’incite à dire, pendant son procès : « Je suis né sous une telle étoile que nul au monde n’a jamais fait et ne pourra jamais faire ce que j’ai fait. »

Et, assurément, le marquis de Sade n’est qu’un