Page:Huysmans - La Cathédrale, 1915.djvu/17

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Jamais cet effroyable appétit de laideur qui déshonore maintenant l’Eglise ne s’était plus résolument affirmé que dans cet endroit ; et si, devant l’obsédante avanie de ces indignes groupes inventés par un sieur Barrême d’Angers et fondus dans les usines à locomotives du Creusot, l’âme pouvait gémir, le corps souffrait, lui aussi, sur ce plateau, dans cet étouffement de masses qui lui barraient la vue.

Et c’était pourtant là que des milliers de malades s’étaient fait hisser et affrontaient ce terrible climat où, l’été, le soleil vous calcine, alors qu’à deux pas, à l’ombre de l’église, on gèle.

Le premier et le plus grand des miracles accomplis à La Salette avait consisté à faire envahir par des foules cette zone escarpée des Alpes ; car tout était réuni pour les en écarter !

Et elles y sont venues, pendant des années, tant que Lourdes ne les a pas accaparées, car c’est à partir de la nouvelle apparition de la Vierge que date la déchéance de ces lieux.

Douze ans, en effet, après l’événement de La Salette, la Vierge se montra, non plus dans le Dauphiné, cette fois, mais dans le fond de la Gascogne. Après la Mère des larmes, après Notre-Dame des Sept-Douleurs, c’est la Madone des sourires, Notre-Dame de l’Immaculée Conception, la Tenancière des glorieuses Joies, qui se présente ; et, là aussi, Elle révèle à une bergère l’existence d’une source qui guérit les maux.

Et c’est ici que l’effarement commence. L’on peut dire que Lourdes est tout l’opposé de La Salette : le panorama y est magnifique, les parages s’éploient