Page:Huysmans - Sainte Lydwine de Schiedam (1912).djvu/219

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— De grâce, fit-elle, cessez vos interrogations ; je suis souvent forcée par charité de distribuer à mon prochain les feuilles de mon arbre, mais la racine ne leur appartient pas et doit demeurer dans la terre, cachée ; contentez-vous donc de cette feuille que je vous ai, de mon plein gré, offerte et n’en réclamez pas davantage.

Ces deux derniers faits ont été confiés à Thomas A Kempis par le P. Hugo, sous-prieur du monastère de sainte Élisabeth, près Brielle, qui les tenait, lui-même, des intéressés.

L’on se demande comment, vivant dans un pareil tohu-bohu de monde, la pauvre fille pouvait se recueillir et suivre ce chemin de croix qu’elle s’était si strictement tracé. La vérité est peut-être que l’Esprit Saint parlait par sa bouche, alors qu’elle était, elle-même, absorbée en Dieu, loin des assaillants ; moins sévère que ses anges que ces visites agaçaient, Notre-Seigneur restait près d’elle.

Peut-être aussi faisait-elle, ainsi que sainte Gertrude qui feignait, en pareil cas, de s’assoupir, pour se recouvrer ne fût-ce qu’une seconde ; mais ses réelles heures de tranquillité étaient certainement celles de la nuit. Comme elle ne dormait plus, et que son logis était enfin vide de clients, elle était libre alors de s’évader hors d’elle-même, de se serrer doucement contre l’Époux, de prendre à son contact une provision de patience et de courage, pour supporter les douleurs du lendemain.