Page:Huysmans - Sainte Lydwine de Schiedam (1912).djvu/91

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Il manque à la série des affections subies par la pauvre fille. Dieu qui, dans les Écritures, et dans les vies des saints, paraît s’intéresser d’une façon particulière au « mesel » ou lépreux qu’il guérit ou dont il emprunte la repoussante image pour tenter la charité des siens, Dieu ne voulut pas imposer à sa pitoyable servante cette dernière épreuve ; et le motif de cette exception qui étonne tout d’abord, on le comprend pour peu que l’on y réfléchisse. La lèpre eût contrecarré les desseins du Seigneur et rendu l’expansion de la sainteté de Lydwine, nulle.

Il faut se rappeler, en effet, que, pendant le Moyen Âge, les lépreux, considérés comme incurables, car toute la pharmacopée de ses docteurs, l’ellébore, les bains de soufre, la chair de vipère usités dès l’antiquité déjà, l’arsenic essayé par Paracelse, n’avaient pu parvenir à en guérir un, furent enfermés, par peur de la contagion, dans des hospices spéciaux ou isolés dans de petites maisons, dans des « bordes » qu’il leur était interdit, sous menace des plus dures peines, de quitter. Ils durent même revêtir un costume distinctif, une sorte de housse grise ou d’esclavine, agiter avec une main toujours enveloppée d’un gant une crécelle dite tartavelle pour empêcher les gens de s’approcher. Le lépreux était un paria, mort civilement, séparé à jamais du monde, et on l’enterrait, après son trépas, dans un lieu à part.

La liturgie était pour lui, terrible ; avant de le séquestrer, l’Église célébrait, en sa présence, une messe du Saint-Esprit avec l’oraison « pro infirmis », puis