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HISTOIRE DES BERBÈRES

sont restés fidèles à l’islamisme et ont perdu leur ancienne habitude d’apostasier.

Plus tard, les principes de la secte kharedjite se développèrent chez eux. Cette nouvelle doctrine leur avait été apportée de l’Irac, son berceau, par quelques Arabes qui vinrent se réfugier en Ifrîkïa. Nous avons dit ailleurs, dans une notice sur les Kharedjites, que leur secte se partagea en plusieurs branches, telles que les Sofrites, les Eibadites et autres.

Le kharedjisme s’étant rapidement propagé dans le pays, devint, pour les esprits séditieux d’entre les Arabes et les Berbères, une puissante arme pour attaquer le gouvernement. De tout côté, ces aventuriers recrutèrent des partisans parmi les Berbères de la basse classe et leur enseignèrent les croyances hétérodoxes qu’ils professaient eux-mêmes. Habiles à déguiser l’erreur sous le voile de la vérité, ils parvinrent à répandre dans le peuple les semences d’une hérésie qui jeta bientôt de profondes racines. Ensuite ils portèrent l’audace au point d’attaquer les émirs arabes [qui gouvernaient l’Afrique], et en l’an 102 (720-1), ils tuèrent Yezîd-Ibn-Abi-Moslem, dont certains actes leur avaient déplu.

En l’an 122 (739-40), ils se révoltèrent contre Obeid[1]-Allah-Ibn-el-Habhâb qui gouvernait alors l’Afrique au nom du khalife Hicham-Ibn-Abd-el-Mélek. Cet émir avait envahi le Sous afin d’y châtier les Berbères, et ayant fait sur eux un grand butin et une foule de prisonniers, il s’était porté en avant jusqu’au pays des Messoufa où il tua beaucoup de monde et fit encore des prisonniers. Les Berbères en furent consternés ; mais ils se soulevèrent bientôt, quand ils eurent appris que le vainqueur les regardait eux-mêmes comme un butin acquis aux musulmans et qu’il se proposait en conséquence, de prendre le cinquième de leur hombre [pour en faire des esclaves]. Meicera-el-Matghari se révolta alors à Tanger, et en ayant tué le commandant, Amr[2]-Ibn-Abd-Allah, il proclama la souveraineté du chef des Sofrites, Abd-el-Ala-Ibn-

  1. Le texte arabe porte, par erreur, Abd.
  2. Il faut lire Omar.