Page:Ibn Khaldoun - Prolégomènes, Slane, 1863, tome I.djvu/315

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

D'IBN KHALDOUN.

��191

��et si le tahaddi s'y trouve , cela ne provient que d'un simple hasard. Si l'homme qui a opéré un prodige l'a annoncé d'avance , ce prodige ^ servira tout au plus à constater la sainteté de l'individu, mais il ne prouvera pas qu'il soit prophète. Le maître, Abou Ishac- et d'autres docteurs qui ont examiné cette question n'admettent pas que, dans un prodige, il puisse y avoir un fait surnaturel. Par cette restriction ils veulent empêcher qu'un prodige accompagné d'une annonce préa- lable [tahaddi) ne conduise à confondre la qualité de oaéli, ou favori de Dieu, avec celle de prophète.

D'après ce que nous avons exposé, le lecteur comprendra la diffé- rence qui existe entre ces deux classes de manifestations, et recon- naîtra que l'annonce préalable d'un prodige opéré par un favori de Dieu n'a pas le même résultat que l'annonce d'un miracle opéré par un prophète. Donc l'opinion du mailre, telle qu'on nous l'a trans- mise, ne saurait être authentique^. Peut-être ce docteur a-t-il seule- ment voidu nier que les choses surnaturelles opérées par les favoris de Dieu soient de la même nature que celles qui émanent des pro- phètes, en se fondant sur le principe qu'à chacune de ces deux classes d'hommes est attribuée une catégorie spéciale de faits surnaturels.

Quant aux Motazclites , ils nient la possibilité d'un prodige opéré par un o«e/i;car, disent-ils, les faits ex/raorfiin«ire5 (surnaturels) n'ap- partiennent pas à la catégorie des actes de l'homme, vu que tous

��' Le pronom affixe, étant au féminin, doit se rapporter à kAS.

' Abou Isliac Ibrahim el-lsferaïni , cé- lèbre docteur du rite chafeïle et auteur d'un grand ouvrage sur la théologie dogma- tique, était natif d'Isferaïn, ville du Kho- raçan. Il mourut àNeïsabour, l'an 4i8 de l'hégire (1027 de J. C ). Dans les ouvrages scolasliques, on le désigne par le titre ho- norable à'ostad, c'est-à-dire le maître.

' Ibn Khaldoun raisonne mal ici ; mais sa conclusion est juste. Il aurait dû s'ex- primer ainsi : « Un prodige accompagné

��d'un tahaddi ne se distingue d'un mira- cle que par son résultat moral. Or, avant de connaître co résultat, on pourrait le prendre pour un miracle, parce qu'il en a tous les caractères. Le maître, dit-on, a tranché le nœud de la difficulté en sou- tenant qu'aucun prodige ne renferme un fait surnaturel; mais celte doctrine est absurde, parce que le prodige consiste essentiellement en un fait surnaturel : sans ce fait, il n'y a point de prodige. Aussi est-il impossible de croire que le maître ait jamais avancé une pareille assertion. »

�� �