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D'IBN KHALDOUN. 287

aussi conserve-t-il toujours intactes les qualités qui lui ont procuré l'illustration et qui la maintiennent. Son fils, auquel il remet le pou- voir, a déjà appris de lui comment il doit se conduire; mais il ne le sait pas d'une manière complète; celui qui entend raconter un fait ne le comprend pas aussi bien que le témoin oculaire. Le petit-fils succède au commandement et se borne à marcher sur les traces de son prédécesseur et à le prendre pour modèle unique; mais il ne fait pas les choses aussi bien que lui ; le simple imitateur reste toujours au-dessous de celui qui travaille sérieusement. L'arrière petit-fils suc- cède à son tour et s'arrête tout à fait dans la voie suivie par ses aïeux; il ne conserve plus rien de ces nobles qualités qui avaient servi à fonder f illustration de la famille; il ose même les mépriser, et il s'ima- gine que ses aïeux s'étaient élevés à la gloire sans se donner la moindre peine et sans faire le moindre effort. Se figurant que, par le seul fait de leur naissance, ils avaient possédé la puissance de tout temps et de toute nécessité, il se laisse tromper par le respect qu'on lui témoigne, et ne veut pas concevoir que sa famille soit arrivée au pouvoir paj^" son esprit de corps et par ses nobles qualités. Ne sachant pas quelle est forigine de la grandeur de ses aïeux, il en méconnaît les vérita- bles causes, et croit que le pouvoir leur était venu par droit de naissance; aussi se met-il bien au-dessus^ des guerriers dont l'es- P. sdg. prit de corps soutient encore la dynastie. Habitué, dès son enfance, à leur donner des ordres, il demeure convaincu de sa supériorité et il ne se doute pas que leur obéissance ait eu pour cause les grandes qualités au moyen desquelles ses prédécesseurs avaient dompté tous les esprits et gagné tous les cœurs. Ses troupes, indisposées par le peu de considération qu'il leur montre, commencent par lui man- quer de respect; ensuite elles lui témoigent du mépris; puis elles le remplacent par un nouveau chef, pris dans une autre branche de la même famille. Elles montrent par là que la famille dominante impose toujours par son esprit de corps ^, fait que nous avons déjà signalé;

Pour 'Ij^ , lisez Ij^. — ' Pour j^Aaaa^oju, lisez YA^MA^ajJ.

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