Page:Ibn Khaldoun - Prolégomènes, Slane, 1863, tome I.djvu/507

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D'IBN KHALDOUN. 383

désirer. Tant qu'elle continue bonne et bienfaisante, tout l'avan- tage en est pour les sujets; mauvaise et malfaisante, elle nuit aux sujets et peut amener leur ruine. La bonne maîtrise est donc l'équi- valent de la douceur. Quand un souverain se montre violent , prompt à punir, empressé à rechercher les fautes de ses sujets et à tenir compte de leurs méfaits, le peuple, effrayé et abattu, cherche à se garantir contre la sévérité du prince par le mensonge, la ruse et la tromperie. Cela influe sur le caractère des sujets et devient pour eux une seconde nature; aussi perdent-ils leur droiture naturelle et leurs autres bonnes qualités. Quelquefois ils abandonnent le sultan au moment où il va livi'er une bataille ou qu'il s'occupe à repousser ses ennemis; aussi la défense du pays se fait mal, tous les cœurs étant indisposés. D'autrefois ils conspirent contre ^ lui et l'assassinent. Cet événement jette le désordre dans l'Etat et laisse l'empire exposé aux invasions^. Si, au contraire, son règne tyrannique se prolonge, le patriotisme de la nation s'affaiblit, et les frontières restent exposées aux insultes, faute de défenseurs. Le souverain qui gouverne ses su- jets avec douceur et les traite avec indulgence gagne leur confiance et s'attire leur amour; ils se rallient tous autour de lui, l'aident avec dévouement à combattre ses ennemis^, et son autorité se main- tient partout. Le bon caractère du souverain se manifeste* dans la P. 34 1. douceur qu'il montre envers son peuple et dans le zèle qu'il met à le protéger. L'essence de la souveraineté c'est de protéger les su- jets. La douceur et la bonté du sultan paraissent dans l'indulgence qu'il leur montre et dans les soins qu'il met à leur assurer les moyens de vivre; c'est là une bonne manière de gagner leur affection. 11 faut maintenant savoir qu'un souverain à fesprit vif et sagace est peu dis- posé à la douceur; cette qualité ne se trouve ordinairement que chez un monarque débonnaire et indulgent. Le moindre défaut d'un sou- verain doué d'une vive intelligence, c'est d'imposer à ses sujets des tâches au-dessus de leurs forces; car il porte ses vues bien au delà

' Après tyu^l, ajoutez J^. ' Pour ibttNcI, lisez *j|i>cl.

' Littéral. « et ruine la clôture. » ' Littéral. « a pour conséquences. •

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