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D'IBN RHALDOUN. 423

la vie. Voyez Ali; aussitôt qu'il fut nommé khalife, El-Moghîra lui conseilla de conserver Zobeïr, Moaouïa et Talha dans leurs com- mandements, jus(ju'à ce qu'il se fût assuré la fidélité du peuple et qu'il eût établi le bon accord entre les musulmans. « Alors, lui dit- il, tu feras ce que tu jugeras convenable. » Ce fut là un conseil de bonne politique, mais Ali le repoussa pour ne pas agir avec dupli- cité, chose défendue par l'islamisme. Le lendemain, El-Moghîra vint P. 37b. le trouver et lui dit : « Hier, je t'avais donné un conseil; mais je suis revenu là-dessus; il n'était pas bon, et c'est toi qui avais raison. » x^li lui répondit : « Au contraire, tu m'avais bien conseillé, je le sais; aujourd'hui, tu veux m'en imposer. Mais l'amour de la vérité m'em- pêche de faire ce que tu m'avais recommandé. » Voilà comment les premiers musulmans sacrifièrent leurs intérêts mondains au bien de la religion; mais nous.

Nous déchirons noire religion pour réparer notre fortune; aussi noire religion se perd et ce que nous avons réparé ne dure pas.

On a vu que le khalifat se transforma en monarchie tout en con- servant ses fonctions essentielles : le souverain s'efforçait toujours de faire observer les préceptes et les pratiques de la religion et tâchait de suivre le sentier de la vérité. Aucun changement ne s'y faisait re- marquer, excepté dans l'autorité modératrice qui, exercée d'abord par la religion, venait d'être remplacée par la force d'un parti et par celle de l'épée. Tel fut l'état des choses aux temps de Moaouïa , de Merouan, d'Abd el-Melek, fils de Merouan, et des premiers khalifes abba- cides. Sous le règne d'Er-Rechîd et de quelques-uns de ses fils, il en fut de même, mais ensuite la réalité du khalifat disparut et il n'en resta que le nom. Le gouvernement devint une monarchie pure, et l'esprit de la domination, porté maintenant au plus haut point, s'em- ployait pour conquérir et pour gratifier les passions et augmenter les plaisirs du souverain : ce qui était arrivé aux descendants^ d'Abd el-Melek, se reproduisit chez les Abbacides après les règnes d'El-Motacem et d'El-Moléwekkel. Le titre de khalife resta à leurs

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