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D'IBN KHALDOUN. 281

sines, de vêtements et d'ustensiles domestiques, tels que cribles et p. ass. vases. Si l'un de ces gens faisait une pareille demande à Tlemcen ou à Oran, il serait repoussé avec une verte réprimande. J'ai appris que, de nos jours, les habitants de Misr (le vieux Caire) et d'El-Cahera (le nouveau Caire) possèdent de grandes richesses, et qu'ils ont des habitudes de luxe telles que l'observateur en est rempli d'étonnement; aussi beaucoup de pauvres gens quitteraient volontiers le Maghreb s'ils pouvaient se rendre au Caire. Ils ont entendu dire que, dans celte capitale, l'aisance est plus grande que partout ailleurs, et les gens du commun s'imaginent que cela a pour cause la surabondance de richesses dans celte localité, que tout le monde a un trésor chez lui, et qu'on s'y montre plus généreux et plus charitable que dans aucun autre endroit. Mais il n'en est pas ainsi : l'aisance qui règne dans les deux Caires tient à un fait que le lecteur connaît maintenant, savoir, que la population de ces villes est bien plus grande que celle des villes qui nous sont voisines, et que cela procure aux habitants le bien-être dont ils jouissent. Au reste, dans tontes les villes, les dé- penses des habitants se règlent d'après leurs revenus; si les revenus sont grands, les dépenses le seront aussi, et vice versa. Si les revenus et les dépenses sont très-considérables, les habitants vivent dans une grande aisance et la ville tend à s'agrandir. Quand vous entendez parler de (villes où tout le monde est à son aise), vous ne devez pas regarder cela comme un mensonge; vous vous rappellerez que la grandeur de la population est une source de vastes profils, et que ceux-ci fournissent les moyens de satisfaire, avec prodigalité même, aux demandes de chaque solliciteur. Un autre exemple des effets dvi bien-être d'une population nous est offert par le nombre d'animaux non domestiques qui fréquentent les maisons d'une ville; on peut re- marquer qu'ils sont farouches dans le voisinage d'une maison et fa- miliers dans le voisinage d'une autre. Voici l'explication de ce fait : chez les gens riches, qui tiennent une bonne table, beaucoup de grains et de miettes se répandent par terre dans la cour et dans les basses-cours; les fourmis et autres animaux rampants y arrivent en

Pi'olésomènes. — ii. 36

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