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D'JBN KHALDOUN. 335

emploient. Quelquefois aussi elles sont exprimées par des lellres qui ne sauraient (être isolées et) former des mots par elles-mêmes'. C'est pour cela que le langage des Arabes se divise, comme nous l'avons dit, en diverses catégories, à raison des diverses manières d'exprimer ces modifications. Oi- la langue arabe, pour cette raison ^ se dis- P. 3oo. tinguail de tous les autres idiomes par une plus grande concision, parce qu'elle désignait les pensées par un plus petit nombre de mots, et c'est là ce qui a fait dire au Prophète : «J'ai reçu (de Dieu) des paroles qui disent beaucoup, et mon style se distingue par une extrême concision. » On remarque un exemple de cela dans l'anecdote que l'on raconte d'Eïça Ibn Omar'. Un grammairien lui avait dit qu'il croyait avoir remarqué dans le langage des Arabes une sorte d'abondance oiseuse, en ce qu'on pouvait dire, pour ex- primer une seule et même pensée, Zeîdon caïman (Zeidus stans), ou inna Zeidan caïnion (certe Zeidus stans), ou enfin inna Zeîdan^ le- caïrnon (certe cquidcm Zeidus slans). Eïça lui répondit que ces trois manières de s'énoncer difTéraicnl pour le sens: la première s'adresse à une personne qui ne pensait pas même si Zeid était debout; la se- conde, à une personne à laquelle on avait dit cela et qui ne l'avait pas cru; enfin la troisième, à une personne qu'on savait être dans la disposition de s'obstiner à ne pas croire ce qu'on lui disait. La différence de l'expression est donc motivée par la différence des cir- constances.

- Cette faculté de s'exprimer clairement et correctement se conserve encore aujourd'hui chez les Arabes, et l'exercice n'en a jamais été né- gligé. N'écoutez donc pas les sornettes de certains grammairiens, tout occupés de la syntaxe des désinences, mais dont les esprits ne sau- raient s'éleverjusqu'à la connaissance réelle des choses; (ne les croyez pas) quand ils prétendent que l'art d'exprimer correctement ses

' Il s'agil des lellres qu'on ajoute au ' Eïça Ibn Omar, célèbre grammairien

verbe primitif afin d'en obtenir les formes de la tribu de Tbakîf, mourut l'an i/ig de

dérivées, le» temps, les modes, etc. l'hégire {766 de J. C).

' Pour osLii, lisez eUjJ. ' Pour i\jj, lisez liwj.

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