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Page:Icy - Brassée de faits, 1926.djvu/131

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UN BON MARIAGE

Ce qui m’amusait autant que la vue de derrières masculins rougissants, mais rougissants à faire croire que le sang allait partir de toute la peau claquée, c’était la tête que les deux autres représentants du sexe dominateur faisaient pendant ce temps-là. Chacun d’eux, la plupart des fois, se doutait que son tour viendrait ensuite. Leur honte d’être fessés par une femme, eux, des hommes, de futurs électeurs, de futurs faiseurs de lois, d’être fessés devant une autre femme et devant une fillette qui se moquait d’eux et qui, ils le savaient, savourait leur humiliation, oh ! j’ai passé des instants exquis à la déguster, je le déclare, et rien, rien, ne vaudra jamais cela… C’est mon plus cher souvenir.

Et, entre temps, dans l’intervalle de deux corrections, les menaces outrageantes qu’ils s’entendaient adresser, venant doucher leur orgueil à des moments savamment choisis pour que cela leur fût plus sensible et particulièrement vexant. Cela aussi me ravissait… En promenade, par exemple, au Luxembourg, aux Tuileries, ou ailleurs, madame Henry, que bientôt maman imita, trouvant l’idée excellente, madame Henry s’ingéniait à profiter de ce qu’à proximité passaient des fillettes ou de grandes jeunes filles pour s’adresser en ces termes, à l’un quelconque de ses fils, et de manière à ce que ce fût parfaitement entendu :

— Tu auras la fessée en rentrant. Ton frère aussi !…

Maman, venant à l’appui, ajoutait, avec son articulation merveilleuse :

— Ils l’auront tous les trois. Et ce sera comme hier, une bonne fessée !… une bonne fessée à chacun…