Aller au contenu

Page:Inchbald - Simple histoire.djvu/160

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

simple passage de la joie au chagrin, du plaisir à la peine ; c’était de la douleur, c’était une angoisse véritable que ressentait miss Milner et que son visage exprimait.

— Elle ne pleurait pas, mais elle appela miss Woodley auprès d’elle, d’une voix qui faisait comprendre tout ce qu’elle souffrait.

— « Milord, s’écria miss Woodley, qui le voyait consterné et qui craignait qu’il ne pénétrât le secret de sa pupille, Milord, miss Milner vous a encore trompé, ne lui parlez plus de quitter Londres, voilà ce qui lui a fait tant de mal. »

Il parut encore plus affligé de sa mauvaise foi que de l’état où elle était. — « Bon Dieu ! s’écria-t-il, comment remplirai-je jamais ses désirs ? que dois-je faire ? comment saurai-je ce qu’elle veut, si, au lieu de se fier à moi, elle continue toujours ainsi à me tromper ? »

Elle s’appuyait, pâle comme la mort, sur l’épaule de miss Woodley ; son œil était fixe, elle paraissait insensible à tout ce qu’on lui disait. — Il continua :

« Le ciel m’en est témoin, oui, si je le savais, si je concevais quelque moyen de la rendre heureuse, mon bonheur même, je le lui sacrifierais. »

— « Milord, dit en souriant miss Woodley, peut-être quelque jour vous rappellerai-je cet engagement. »

La confusion de ses pensées ne lui permit pas de chercher le sens de ces paroles, mais il reprit avec feu : « Parlez, je suis prêt à le tenir ; parlez, vous verrez si je saurai le tenir. »

Quoique miss Milner sût très-bien qu’elle ne pouvait, en conscience, se prévaloir contre lui de cette déclaration, cependant l’ardeur avec laquelle il l’avait faite ranima ses esprits. Elle éprouva cette sorte de plaisir qu’on ressent quelquefois, en songeant qu’on possède quelque chose de