Page:Inchbald - Simple histoire.djvu/169

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Milner devenait sensible, toutes les fois qu’elle se peignait miss Fenton adorée de milord Elmwood et l’objet de ses empressemens.

Au moment où l’opéra finit, elle se hâta de descendre comme pour fuir sa loge et les tourmens qu’elle y avait endurés, et au lieu d’entrer au café, ainsi que l’en pressait miss Woodley, elle attendit sa voiture à la porte.

Le cœur brisé, et plein de dépit et de ressentiment contre celui dont elle avait à se plaindre, elle ne faisait aucune attention à tout ce qui se passait autour d’elle ; en ce moment une main presse doucement la sienne, et une voix respectueuse et tendre lui dit : — « Voulez-vous bien me permettre de vous accompagner jusqu’à votre voiture ? » À ces mots, elle sort de sa rêverie, regarde, et voit à ses côtés milord Frédéric. Soit que son cœur, attendri par son amour pour un autre, fût plus accessible qu’auparavant ; soit qu’animé par le ressentiment, il se hâtât de saisir une occasion de vengeance, — il est certain que ce moment fut favorable à milord Frédéric. Elle parut charmée de le voir, et milord s’en aperçut avec tout le ravissement d’un humble adorateur. Assurément ce qu’elle sentait pour lui n’était rien moins que de l’amour, c’était seulement de la reconnaissance pour l’empressement de milord, comparé à l’indifférence avec laquelle son tuteur la traitait ; mais milord Frédéric était bien excusable de s’y méprendre et de regarder ce mouvement de reconnaissance comme une étincelle de l’affection secrète qu’elle conservait pour lui ; cependant cette méprise ne le fit pas sortir des bornes du respect ; il la conduisit à sa voiture, la salua profondément et disparut.

Miss Woodley aurait voulu la guérir d’un amour qui ne pouvait que la rendre malheureuse ; aussi, pendant le chemin, fit-elle l’éloge de milord Frédéric et s’efforça-t-elle