Page:Inchbald - Simple histoire.djvu/175

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— « Me voilà donc sûre, à présent, d’avoir une excuse. Je vous remercie, monsieur Sandford, c’est la chose la plus obligeante que vous m’ayez dite encore. Mais je vois avec peine que vous êtes fâché de l’avoir dite. »

— « Fâché que vous soyez hérétique ! reprit-il. En vérité, je le serais bien davantage, si je vous voyais faire honte à notre religion. »

Déjà plusieurs fois dans la soirée miss Milner avait eu besoin de toute sa patience, mais elle n’en trouva plus contre cette réplique de M. Sandford ; et se levant dans la plus violente agitation : « Qu’ai-je fait, s’écria-t-elle, pour être ainsi traitée ? »

Quoique Sandford ne fût pas homme à être intimidé aisément, cependant son trouble fut visible, et le mouvement de surprise qui le fit tressaillir ressembla beaucoup à de la peur. Miss Woodley, voyant son amie prête à suffoquer, la prit dans ses bras, et lui dit d’un ton plein de tendresse et de pitié : « Ma chère miss Milner, calmez-vous. »

Miss Milner s’assit ; mais pendant quelques minutes, Sandford fut plus effrayé de son morne silence qu’il ne l’avait été de sa colère, et il ne redevint parfaitement tranquille qu’au moment où il vit les larmes baigner le visage de miss Milner ; alors il soupira de joie de voir que cette scène se terminait ainsi ; mais il se promit bien de ne jamais lui pardonner le ridicule effroi où elle l’avait jeté, et il sortit sans proférer une syllabe. — Comme il ne se couchait jamais sans faire une longue prière, quand il en fut à l’endroit où l’on implore la clémence du ciel pour les méchans, il prononça le nom de miss Milner avec la plus fervente dévotion.