Page:Inchbald - Simple histoire.djvu/184

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chose ; car lorsqu’on est près du désespoir, tout ce qui paraît un peu favorable est reçu avec joie.

Malgré le trouble et l’inquiétude où miss Woodley avait été toute la matinée, depuis long-temps elle n’avait senti son cœur aussi soulagé qu’en ce moment. Sa confiance dans les promesses de milord Elmwood, le fonds qu’elle faisait sur sa délicatesse et sur son caractère, la bonté avec laquelle miss Milner la traitait, la certitude où elle était qu’aucun soupçon ne tourmentait le cœur de son amie, le témoignage qu’elle se rendait de la pureté de ses intentions, quoique peut-être ses intentions mêmes eussent pu l’égarer, tout lui persuadait qu’elle n’avait rien fait qu’elle pût se reprocher ; mais, quoiqu’elle fût ainsi rassurée sur son indiscrétion, elle ne songeait qu’avec crainte et embarras au moment où elle reverrait milord Elmwood.

Miss Milner, ne se sentant point disposée à sortir, passa la soirée avec les dames. Elle lut quelque chose d’un opéra nouveau, chanta, s’accompagna sur sa guitare, devint rêveuse, soupira, causa de temps en temps avec miss Woodley, et passa de tristes momens jusqu’à dix heures, que madame Horton proposa à M. Sandford une partie de piquet. Sandford s’en étant excusé, miss Milner s’offrit à sa place et fut acceptée avec plaisir. — Elle commençait à jouer, lorsque milord Elmwood entra. La physionomie de miss Milner s’anima aussitôt, et quoiqu’elle fût dans un simple déshabillé du matin et plus pâle qu’à l’ordinaire, elle n’en était pas moins belle. Miss Woodley était appuyée sur le dos de la chaise de son amie pour voir son jeu, et M. Sandford, assis de l’autre côté de la cheminée, s’occupait à lire un des Pères de l’Église.

Lord Elmwood, en s’approchant de la table du jeu, salua les dames qu’il n’avait pas vues depuis le matin, et miss Milner, de tout le jour ; elles se levèrent, et il allait à sa pu-