Page:Inchbald - Simple histoire.djvu/186

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elle ; mais il lui fut plus facile de le dire que de le prouver ; car à peine eut-elle porté un morceau à ses lèvres, qu’elle le remit sur son assiette, et qu’elle devint plus pâle encore, pour avoir inutilement voulu forcer son appétit. Lord Elmwood avait toujours été rempli d’attentions pour sa pupille ; mais maintenant, il veillait sur elle comme on veille sur un enfant. Quand il vit qu’elle faisait de vains efforts pour manger ce qu’elle avait devant elle, il lui ôta son assiette, et lui donna quelque autre chose ; tout cela, avec ces soins, cet empressement inquiet qu’un enfant bon et sensible montre pour un oiseau chéri, dont la perte emporterait toute la joie de ses jours de fête.

Ces attentions avaient quelque chose de si tendre, de si prévenant et en même temps de si vrai, que M. Sandford en fut frappé, qu’elles n’échappèrent point à madame Horton, qu’elles firent venir les larmes aux yeux à miss Woodley, tandis que le cœur de miss Milner était tout plein d’une reconnaissance qui ne laissait de place qu’à l’amour.

Pour dissiper l’inquiétude que lui montrait milord Elmwood, elle s’efforça de paraître gaie, et elle le devint en effet, tant il lui était doux d’être l’objet des soins de son tuteur. Celui-ci, encouragé par le succès, sembla redoubler encore d’empressemens, au point que Sandford, qui l’observait, et qui n’était pas accoutumé à cacher ce qu’il pensait, lui dit brusquement :

« Miss Fenton était indisposée hier, Milord, et vous n’étiez pas de la moitié si empressé auprès d’elle. »

Si Sandford eût apporté aux pieds de miss Milner toute la fortune de la maison d’Elmwood, ou même s’il avait fait d’elle une divinité brillante d’un éclat immortel, il ne lui aurait certainement pas causé autant de plaisir qu’en prononçant ce peu de mots ; elle le regarda de l’air le plus gra-