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Page:Inchbald - Simple histoire.djvu/192

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traire, quel triomphe ! quel surcroît de bonheur ! » Ces pensées n’étaient que de pures chimères de son imagination ; jamais elle ne s’en fit un plan de conduite : mais à force de s’en occuper, elle les mit de temps en temps en pratique ; et le dangereux désir de s’assurer si elle serait toujours aimée, malgré ses travers (sorte de gloire à laquelle une femme vaine aspire souvent), était devenu l’ambition de miss Milner. — Femme inconsidérée ! elle ne songeait pas qu’avant de commencer un pareil essai, elle avait à faire oublier à milord Elmwood bien des torts, dont le souvenir suffisait pour mettre à l’épreuve tout son amour et toute sa patience. Mais quelle femme résiste à la tentation de faire des essais ? et qu’il en est peu que ce goût ne conduise à leur perte !

Parfaitement sûre d’être aimée de l’homme qu’elle aimait, sa santé et sa gaîté redevinrent bientôt aussi brillantes que jamais ; et comme son tuteur la laissait à elle-même avec la généreuse confiance d’un amant passionné, elle reprit ses premiers amusemens, son premier train de vie avec moins de réserve qu’auparavant.

D’abord le comte Elmwood, aveuglé par sa passion, l’y encouragea lui-même ; il s’applaudissait de voir qu’elle avait recouvré toute la liberté de son esprit, et tant qu’elle n’abusa pas de sa patience, jamais il ne se plaignit ; mais s’il l’avait toujours vue douce, et même docile, quand il exigeait d’elle qu’elle lui obéît comme à son tuteur, devenu son amant, il lui trouva souvent des airs de hauteur, et presque toujours de la disposition à l’insolence, pour peu qu’elle fût contredite. Il était surpris d’une conduite si nouvelle, mais la nouveauté lui en plaisait ; il adorait miss Milner, et toutes les formes sous lesquelles elle s’avisait de se montrer, ne servaient dans le premier moment qu’à la lui faire paraître plus aimable.