Page:Inchbald - Simple histoire.djvu/197

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avait été si long-temps le supérieur de ceux avec qui il vivait, il avait été si occupé à les instruire, qu’il n’avait pas eu le loisir de s’apercevoir qu’il avait lui-même besoin d’instruction. Sa sévérité en imposait tellement à ses amis, que, quoiqu’il en eût beaucoup, aucun ne l’avait averti de ses imperfections, excepté, dans ce moment même, milord Elmwood ; mais milord aimait, et quelle confiance mérite un homme aveuglé par l’amour ? Sandford n’avait donc aucun moyen de se bien connaître. Ses ennemis, à la vérité, lui faisaient entendre qu’il n’était pas parfait ; mais ses ennemis, jamais il n’avait pris la peine de les écouter ; avec tout son bon sens, il n’avait pas celui de régler sa conduite sur cet axiome bien connu : — Dans ce que l’on vous dit, croyez-en plutôt un ennemi qu’un ami. Bien des gens, dans le monde, gagneraient à suivre cette maxime, et Sandford, sur-tout, s’en serait bien trouvé. Qu’il eût été heureux pour lui qu’un ennemi qu’il aurait estimé, lui eût dit à l’oreille, au moment où il quittait lord Elmwood : « Homme cruel, barbare, tu pars avec un cœur satisfait et triomphant, parce que tu crois que les espérances de miss Milner, ces espérances qui font sa vie, son bonheur, qui, seules, l’empêchent de retomber dans le plus profond chagrin, tu crois que ces espérances seront trompées ; tu te flattes de n’être si content, que parce que tu aimes milord Elmwood, et que tu l’arraches au danger. Sans doute tu l’aimes, mais cherche dans ton cœur, tu y trouveras une autre cause de ta joie. — C’est qu’en sauvant ton ami, tu perds sa pupille. Ô honte ! ô honte ! oublie plutôt ses fautes, comme tu as besoin qu’en ce moment elle te pardonne les tiennes ! »

Si on eût tenu ce langage à Sandford, c’était un homme si droit, si scrupuleux, qu’il serait à l’instant même retourné auprès de milord, et qu’il l’aurait fortifié dans l’o-